Publié le mardi 06 juin 2023 à 10:33 - Mis à jour le mercredi 07 juin 2023 à 17:42 Province
D’ici au mois d’août, la zone de secours Luxembourg doit se trouver un nouveau commandant. Faute de candidats, le colonel Stéphane Thiry accepterait de briguer un second mandat… à condition de renforcer l’équipe de direction. Certains bourgmestres hésitent. Quelle direction prendra la zone de secours ?
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Fin mars 2022, le colonel Stéphane Thiry déclarait sur les antennes de TV Lux ne pas rempiler dans un second mandat comme chef de zone. L’annonce en avait surpris plus d’un, tant le commandant semblait incarner la fonction, présent sur tous les fronts, des inondations aux incendies de forêts, en passant par les prises en charge Covid... Le verbe facile, l’homme n’a pas ménagé ses efforts pour convaincre et défendre sa vision de la zone, la réforme 4.0, qui redéploie les 700 pompiers professionnels et volontaires et les 250 véhicules autour des dix-sept casernes.
Mais la plus grande des motivations a ses limites. Et l’homme était apparu fatigué. Peut-être pas tant par le volume de travail, qui “impacte lourdement la vie privée, à en oublier sa famille”, que par la répétition de réactions de quelques élus, communaux et provinciaux, pas toujours à propos, pas toujours bien informés, pas toujours courtois… “Il est devenu plus difficile de travailler sereinement, lorsqu’on doit essuyer des piques, des petites insinuations, des remises en cause de décisions prises”, nous avait-il expliqué en interview, avant d’ajouter : “Je suis là pour faire évoluer la zone, et non pas pour remettre des rapports sur rapports, des dossiers sur dossiers, au bon vouloir de certains élus”.
Pas de candidat
Les mandataires du conseil de zone disposaient donc d’une bonne année, jusqu’au mois d’août prochain, pour dégoter le remplaçant idéal. Oui mais voilà, le premier appel à candidatures a trouvé deux réponses et n’a pas donné satisfaction. Le second appel, début de cette année, n’a même pas éveillé le moindre intérêt. Zéro candidat, la zone se retrouve au pied du mur.
Dans ces circonstances, imaginer un troisième appel semblait illusoire, d’autant que les conditions d’accès à la fonction viennent d’être durcies, et qu’elles le seront encore un peu plus en 2024. “A partir de là, les postulants devront être titulaires du brevet “OFF4”. Sur toute la Wallonie, on ne compte que vingt détenteurs de ce brevet. Et aucun ne voulait postuler en Luxembourg”, souligne un officier de la zone.
Dans l’impasse, le conseil s’est à nouveau tourné vers Stéphane Thiry. Après réflexion et un peu de repos, l’homme est revenu sur sa décision, a déposé sa candidature et… ses conditions, “pour rendre la fonction viable”. “Il est revenu vers nous en demandant un double renfort à la direction : un commandant adjoint, et un ingénieur industriel, qui, lui, serait davantage chargé des aspects techniques, des marchés publics, du suivi des chantiers...”, nous glisse un bourgmestre membre du collège de zone.
Le point a été présenté au dernier collège, qui a décidé… de reporter la question à la réunion suivante, fixée à la date de ce mercredi 7 juin. Le temps, peut-être, que l’idée fasse son chemin. “Sa demande est légitime. Mais quand il s’agit d’ouvrir le porte-feuilles, les bourgmestres y regardent à deux fois. Et certains plus que d’autres”, reconnaît l’un d’entre eux. Un autre ajoute : “Je pense qu’il y a une forme d’unanimité autour du poste de commandant adjoint. C’est plus compliqué pour le second renfort. Il faut voir s’il ne serait pas préférable de s’appuyer davantage sur les services techniques provinciaux par exemple”.
Une intervention toutes les 19 minutes
Les conditions posées par le candidat-commandant -deux renforts- seraient-elles démesurées ? Car, tout de même, celui “dont la compétence et l’investissement sont reconnus de tous”, insiste un de nos interlocuteurs, est aussi seul candidat, en position de force. C’est vite oublier cependant que le chef de la zone de secours Luxembourg est à la tête de 740 pompiers -260 professionnels et 480 volontaires, répartis sur 17 postes. C’est oublier que la zone disposait de 31 officiers à sa création en 2014, et qu’elle en compte 23 aujourd’hui, dont la moitié sera admis à la retraite dans les dix ans !
En matière d’interventions, la zone de secours Luxembourg vient tout juste de publier son rapport d’activités. En 2022, elle comptabilise 20.017 prises en charge ambulances AMU et 6456 sorties pompiers, ce qui fait une intervention toutes les 19 minutes ! En termes d’échanges téléphoniques, le dispatching provincial a décroché 47.903 fois le combiné, et passé 142.178 communications radio.
Certes, comparaison n’est pas raison, mais au regard de la police locale, l’autre corps d’intervention, la zone de secours pourrait faire figure de parent pauvre. “C’est vrai que les polices locales sont mieux loties”, admet ce bourgmestre de Centre-Ardenne, “pour le même territoire, il y a six commandants et beaucoup plus d’officiers et d'adjoints directs. Une des raisons trouve son origine dans le fait que les salaires des ex-gendarmes sont pris en charge par le fédéral…”
Alors oui, les finances locales sont mises sous pression de toutes parts, mais il revient aux élus de déterminer la hauteur des investissements à dédier à la sécurité des Luxembourgeois. “La zone de secours est une des plus grandes entreprises de la province de Luxembourg”, se plaît à dire son commandant. A ce titre, ajoutons-nous, elle se doit d’en recevoir les moyens.