Info

Après quatre années d'aide aux migrants, le collectif Escal de Neufchâteau passe la main

video loading
loading video
 Publié le mardi 14 novembre 2023 à 16:30 - Mis à jour le mardi 14 novembre 2023 à 16:46    Léglise - Neufchâteau

Conséquence du Brexit, moins de migrants tentent leur chance depuis les parkings autoroutiers. Après quatre années d'intense mobilisation, le collectif d'aide aux migrants ESCAL referme ses portes à Neufchâteau. Les bénévoles ne veulent pas se substituer à Fedasil. Bilan d'une aventure marquante...


Newsletter

Recevez notre newsletter pour ne rien manquer de l'info, du sport et de nos émissions


Adhanom sera le dernier hébergé dans l'ancienne crèche de Longlier, transformée il y aura bientôt quatre ans en centre d'accueil pour migrants. Reconnu en décembre dernier déjà au statut de réfugié, le jeune Erythréen est sur le point de prendre son indépendance. "Ça nous fait vraiment plaisir pour lui", confie Florence Conroth, l'oeil protectrice pour celui qui est arrivé en Belgique en juillet 2022,  et à Neufchâteau deux mois plus tard. "Sa reconnaissance comme réfugié a été rapide, mais depuis, c'est tout le reste qui prend du temps et de l'énergie". Tout le reste ? Ce sont les documents à remplir, à la banque, à la commune, au CPAS, à Fedasil... Ce sont les nombreuses demandes trop souvent sans réponse aux recherches de logement... "Mais ça va aller. Il devrait avoir trouvé quelque chose". Dix mois que ça dure.

Quatre années d'engagement en faveur des migrants

Comme ce jeune homme exilé,  ils sont près de deux cents migrants à avoir trouvé de l’aide auprès du collectif Escal de Neufchâteau-Léglise. Un des groupements citoyens à avoir vu le jour le long de la E411, ou proche des trois frontières.
Pour ces bénévoles, dont certains ne se connaissaient pas, l’histoire a débuté en 2019, en bordure d’autoroute, tout en discrétion, à la limite de la légalité. "Nous avons commencé par apporter un peu nourriture et des vêtements à ces hommes qui se cachaient la journée dans les bois sous une bâche et tentaient leur chance à la nuit tombée".

Mais face à l’ampleur de la misère, le collectif est sorti de l’ombre. C'était un soir de janvier 2020. Les bénévoles avaient monté une tente rudimentaire dans une vieille grange, un peu à l'écart. Une dizaine de migrants, soudanais pour la plupart, venaient s'y reposer et s'y réchauffer, lorsque la police a débarqué, forçant tout le monde à vider les lieux. Et poussant le collectif à alerter l'opinion publique...

Originaire de Léglise et Neufchâteau, ces citoyens ont assez rapidement trouver le soutien indispensable auprès de leurs responsables communaux. Des locaux, chauffés, ont été mis à disposition, momentanément d'abord au complexe sportif de Léglise, puis de manière permanente dans l'ancienne crèche de Longlier, retapée par les bénévoles durant quelques week-end

Un réseau solidaire

Durant quatre ans, un véritable réseau s’est constitué. Les dons en vêtements et nourriture ont afflué. Des médecins, opticiens, pharmaciens ont offert leurs services. Des cours de français ont été donnés, deux à trois fois par semaine, par un couple d'anciens professeurs. Aux murs, on peut encore voir les dessins, peintures et collages, réalisés durant les animations artistiques. "Deux fois par semaine, je menais des ateliers. Au début, l'objectif était de les amener à exprimer qui ils étaient, d'où ils venaient, ce qu'ils cherchaient...", confie Isabelle Chassigné.

De Aubange à Arlon, de Habay à Libramont d’autres collectifs ont vécu le même élan, répondu aux mêmes espoirs, et partagé les mêmes questionnements… quand la guerre a frappé aux portes de l’Europe. "On a parfois eu l'impression du deux poids deux mesures entre les réfugiés ukrainiens, dans tout leur malheur également, et les transmigrants, laissés pour compte. On a tâché de continuer notre accueil comme on l'a toujours fait, et laissé le soin aux autorités communales d'accueillir les réfugiés ukrainiens", explique Dominique Dessy.

Au départ de Neufchâteau, une cinquantaine de migrants ont réussi à traverser la Manche et à obtenir leur carte de séjour. Depuis le Brexit en revanche, le renforcement des contrôles aux frontières a rendu vaine leur quête de liberté…

"Les parkings se vident. C'est devenu presque impossible pour eux d'espérer monter à bord d'un camion et rejoindre directement l'Angleterre"
Florence Conroth

Et pour cause, les bénévoles se sont vus contraints de suppléer Fedasil dans les démarches administratives… Des lourdeurs qui les ont éloignés de leur engagement.

Ne pas substituer à Fedasil et à ses manquements

"Comme des places se libéraient, on a commencé petit à petit à héberger des demandeurs d'asile. Mais l'encadrement n'était plus le même...", constate Florence. 
"Cela prend beaucoup de temps, essentiellement en journée, alors que nous travaillons tous. Et puis c'est une multitude de paperasseries,  des matières complexes que nous ne maitrisons pas. Ça n'a plus rien à voir avec l'aide d'urgence que nous apportions", déplore aussi Françoise Thiry.

D’ici peu, les membres du collectif Escal vont refermer les portes de l'hébergement de transit à Neufchâteau, tout en se promettant de rester attentifs aux crises qui se jouent. Prêts à répondre à l’urgence...


Christophe Thiry





Voir aussi ...