Politique

Elections au Luxembourg: le panachage, ce type de vote très particulier

Elections au Luxembourg: le panachage, ce type de vote très particulier
 Publié le samedi 07 octobre 2023 à 07:30    GDL

Alors que les électeurs luxembourgeois se rendront aux urnes ce dimanche 8 octobre, les primo-votants pourront opter pour un type de vote très particulier et spécifique au Grand-Duché: le panachage.


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 Les élections législatives ont lieu ce dimanche 8 octobre au Luxembourg. Et l’électeur qui se rend pour la première fois aux urnes peut être décontenancé: le système de vote au Grand-Duché est en effet très spécifique, puisqu’il permet de recourir au panachage des votes.

Pour bien comprendre, il faut savoir que le Luxembourg est divisé en quatre circonscriptions: Nord, Sud, Centre et Est. Chaque circonscription est représentée à la Chambre par un nombre spécifique de députés, calculé selon son poids démographique: 23 pour le Sud, 21 pour le Centre, 9 dans le Nord et 7 dans l’Est - pour un total de 60 députés dans l’ensemble du pays. L’électeur, selon la circonscription dans laquelle il habite, dispose d’un nombre de votes égal au nombre de députés que la circonscription enverra à la Chambre. Par exemple, un électeur du Centre dispose de 21 suffrages.

Suffrage nominatif ou suffrage de liste?

Face à son bulletin, l’électeur a deux options: soit il recourt au suffrage de liste, soit au suffrage nominatif. En optant pour le suffrage de liste, l’électeur donne tous ses votes à la liste d’un parti politique en particulier. Dans le Centre, les 21 candidats sur la liste du parti politique choisi disposent alors d’un suffrage chacun.

En optant par contre pour le suffrage nominatif, l’électeur vote alors directement pour des candidats, soit au sein d’une même liste, soit parmi des listes distinctes. C’est dans ce dernier cas de figure qu’il recourt au “panachage”. L’électeur peut par ailleurs accorder jusqu’à deux suffrages par candidat - tout en ne dépassant pas au total  le nombre de suffrages dont il dispose (le bulletin serait alors considéré comme nul).

Le résultat des élections comprend la répartition des suffrages par parti. Mais aussi, au sein de chaque liste, le nombre de suffrages par candidat, ce qui décidera de l’ordre dans lequel ceux-ci seront sélectionnés pour être député. Si un parti obtient trois sièges dans une circonscription, les trois premiers candidats ayant obtenu le plus de suffrages seront sélectionnés pour être élus à la Chambre - sauf si l’un d’eux cède sa place.

Forte personnalisation de la campagne

Ce système induit une forte personnalisation du vote au Luxembourg. Certaines personnalités politiques sont d’ailleurs de véritables spécialistes dans l’art de cumuler les voix. C’est le cas du champion en la matière, Jean Asselborn, qui avait réuni en 2018 pour le LSAP plus de 40.000 suffrages dans la circonscription Sud. A 74 ans, l’indéboulonnable ministre des Affaires étrangères est bien sûr candidat à sa réélection. Le Premier ministre, Xavier Bettel, aussi candidat à sa réélection, est un poids lourd pour le DP puisqu’il avait réuni plus de 30.000 voix en 2018.

La sélection des candidats est ainsi un exercice méticuleux pour les partis, notamment celle des têtes de liste. La plupart des partis ont ainsi sélectionné deux têtes de liste dans chaque circonscription (ce qui en fait huit au total), et parmi eux une tête de liste nationale.

Parmi les principaux partis en lice, le choix du Premier ministre, Xavier Bettel, s’est imposé pour le DP puisque celui-ci incarne désormais avec force le parti libéral. Idem pour le LSAP avec Paulette Lenert: celle-ci figure désormais parmi les personnalités politiques préférées des Luxembourgeois depuis qu’elle s’est affirmée en gestionnaire rationnelle et humaine de la pandémie de Covid-19 au poste de ministre de la Santé.

Le choix a été plus laborieux pour le CSV chez qui aucune personnalité politique d’envergure ne s’est imposée depuis l’ère Jean-Claude Juncker. Luc Frieden, qui était en retraite politique depuis dix ans, a été ainsi rappelé par défaut et doit incarner le rôle de l’homme providentiel. Quant à déi Gréng, le leader naturel, François Bausch, a annoncé en cours de mandat ne pas avoir l’intention d’occuper à nouveau un rôle au gouvernement. Sam Tanson a donc dû - peut-être prématurément - prendre la relève pour mener la campagne.

Le panachage pour 31% des votants

Mais quel type de votes a la faveur des électeurs luxembourgeois? Une étude Polindex 2023 réalisée par l'Université du Luxembourg et Ilres pour la Chambre des députés s’est penchée sur la question. Or, un peu moins de la moitié des électeurs (47%) disent vouloir recourir au suffrage de liste. 31% souhaitent pratiquer le panachage en attribuant des voix à des candidats sur différentes listes. Et 22% indiquent vouloir voter pour différents candidats d'une même liste et non pour la liste elle-même.




Cette tendance varie toutefois d’un parti à l’autre. L’électorat du CSV, de l’ADR et des Piraten optent davantage pour le suffrage de liste, à la différence de celui du DP et du LSAP qui y recourent le moins. De quoi faire réfléchir chaque parti sur sa stratégie de campagne.


Pierre Pailler