Publié le mardi 24 octobre 2023 à 09:31 - Mis à jour le mardi 24 octobre 2023 à 17:41 Province
La commune d’Arlon s’est appuyée sur cinq arguments pour dénoncer devant le Conseil d'Etat le permis unique du futur CHR Centre-Sud à Houdemont, délivré à la mi-juillet.
En premier point, la majorité Engagés-MR met en cause “le parti pris du Ministre wallon Willy Borsus”.
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Un vent favorable a porté jusqu’en nos bureaux, une copie de la requête en annulation déposée à la mi-septembre par la ville d’Arlon auprès du Conseil d’Etat.
Par la voix de son avocat, Jean Bourtembourg, Arlon y développe sur cinquante-neuf pages son argumentation pour remettre en cause l’arrêté du gouvernement wallon, signé des Ministres Borsus et Tellier, qui en recours avait donné raison à Vivalia, l’autorisant à construire sa nouvelle infrastructure hospitalière à Houdemont.
Arlon défend son plaidoyer sur cinq éléments.
La plupart sont connus et ont déjà fait l’objet de débats dans les assemblées de Vivalia.
Mais ce qui nous frappe, c’est le premier moyen mis en avant par la majorité Engagés - MR et leur avocat pour dénoncer, ni plus ni moins, le manque d’impartialité du Ministre wallon Willy Borsus et son soutien affiché qui aurait dû le conduire “à ne pas prendre part à la prise de décision sur la demande de permis”.
Un soutien de longue date
L’avocat a remonté le fil de la page Facebook de Willy Borsus et s’est plongé dans les archives de TV Lux, de Sudpresse, de l’Avenir pour énumérer les déclarations qui depuis 2017 confortent l’idée que le Ministre de l’aménagement du territoire “a laissé transparaître, à tout le moins, une apparence de partialité quant à l’issue qu’il convenait de réserver à la procédure”.
Et de citer le Ministre Borsus : “de mon point de vue, le projet Vivalia 2025 est incontournable” ; “rater le train (des subsides wallons, ndlr) aurait été catastrophique” ; “Il est désormais essentiel pour les personnes qui jusqu’ici n’étaient pas convaincues par le projet de se ranger à la réalité des choses” ; “Je suis personnellement prêt à m’investir dans ce dialogue (avec Arlon, ndlr) pour autant que cela ne se fasse pas au détriment de Vivalia 2025”... Aux yeux des requérants, ses prises de position “dépourvues d'ambiguïté” témoignent à quel point le Ministre ne disposait pas de l’impartialité requise dans la décision adoptée conjointement avec la Ministre Tellier.
Les élus arlonais seront attentifs à la réponse du Conseil d’Etat sur cette question fondamentale de l’impartialité que l’on est en droit d’attendre de la part de Ministres appelés à juger la chose en recours.
Mais l’enjeu dépasse le Centre-Sud. Car si la Haute Institution venait à suivre la réflexion et à s’appuyer sur des déclarations anciennes, tempore non suspecto, pour remettre en cause l’impartialité d’un ministre, on peut se demander quelles en seraient les conséquences sur sa liberté d’expression… dans l’éventualité où un jour il serait amené à trancher dans un dossier.
"Une attaque ad hominem"
Toujours est-il que l’argument n’est pas passé inaperçu au sein même du MR Luxembourg.
Il nous revient que le Ministre Borsus, au dernier bureau provincial, a ressenti la démarche des élus MR arlonais comme “une attaque ad hominem”, un manque de loyauté.
Au cours des débats, pour lesquels le ministre s'est retiré, insiste le président provincial, les mots ont fusé ; Benoît Piedboeuf reprochant vivement aux Arlonais "de ne pas s'être distancié de leur majorité" sur cet cet argument mettant en cause l'impartialité de leur Ministre.
“Nous sommes scandalisés par leur attitude”, nous glisse cet autre membre du bureau, “leur positionnement est problématique".
L’épisode laissera des traces. Les plus visibles apparaîtront-elles au moment de confectionner les listes en vue des prochaines élections fédérales et régionales ? Les échevins MR arlonais se sont-ils mis eux-mêmes de côté ? “Si on avait l’embarras du choix, la question ne se poserait même pas…”, nous répond-on à bonne enseigne.
Pas d’alternative correctement analysée
Les autres moyens avancés par l’avocat Bourtembourg relèvent du dossier en tant que tel, et sont davantage connus. Arlon remet ainsi en cause l’étude d’incidence “qui n’a pas correctement examiné d’alternative de localisation”.
Pour les requérants, l’étude s’avère biaisée dès le départ, dès lors que la surface de 20ha minimum a été surévaluée, et biaise toute recherche d’alternative en-deçà. Et de revenir sur l’alternative Habay-Gare : “pas examinée de manière correcte et complète”.
Une révision et non une simple dérogation
Le futur site hospitalier doit voir le jour sur les hauteurs de Houdemont, en bordure d’autoroute, mais sur des terrains agricoles et forestiers. Bien que refusé en première instance par les fonctionnaires délégué et technique, soutenu par un avis défavorable du Pôle Aménagement du Territoire, le permis a été délivré par les Ministres Borsus et Tellier, octroyant de la sorte une dérogation au plan de secteur, assorti tout de même d’une condition de maintien d’une zone de 21,99ha en zone agricole. “Or, soutiennent les élus arlonais, “c’est bien au travers d’une révision du plan de secteur que le projet devait être envisagé, et non au travers d’un simple mécanisme de dérogation”.
En contradiction avec la Vision mobilité 2030
Enfin, le recours met le doigt sur la question de la mobilité autour du CHR de Houdemont, en contradiction avec le plan FAST “Vision de la mobilité 2030” et de la “Stratégie régionale de mobilité”, dans la mesure où le projet “va générer un important trafic automobile journalier extrêmement important”. La justification du nouvel échangeur “n’enlevant rien à cette augmentation de trafic”.
Les arguments ainsi posés depuis la mi-septembre, il revient donc au Conseil d’Etat de se prononcer sur ce recours en annulation. Rappelons que la procédure en cours ne suspend pas la poursuite des travaux de Vivalia.