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Arlon-Viroinval : le SPW défend l’expertise de son agent

Arlon-Viroinval : le SPW défend l’expertise de son agent
 Publié le jeudi 15 juin 2023 à 16:54 - Mis à jour le jeudi 15 juin 2023 à 17:11    Arlon

L’administration wallonne soutient son chef de cantonnement de Viroinval, et la manière dont il a calculé le prix de vente du domaine forestier du “Risque-Tout” : “La ville d’Arlon n’a pas été flouée”.  


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Le Service Public de Wallonie n’a pas apprécié, mais alors pas du tout, les allégations formulées à l’encontre de son agent, auteur de la première expertise du domaine forestier  du “Risque-Tout” à Viroinval. D’ordinaire mesuré, son porte-parole Nicolas Yernaux ne cache pas son irritation à l’écoute et à la lecture des réactions qui laissent entendre que le DNF aurait floué la ville d’Arlon. “Nous nous sentons blessés, que l’honneur de l’institution et d’un agent soient ainsi jetés en pâture. Nous gardons notre totale confiance en notre chef de cantonnement qui est très affecté par la situation”. Et d’ajouter, amer : “ Ce n’est pas très correct de la part d’un autre pouvoir public”.

Comme nous vous l’expliquions hier, la ville d’Arlon vient de prendre connaissance d’une seconde évaluation, qu’elle a demandée auprès d’un expert forestier privé,  à propos des 355 ha de forêts qu’elle détient à Viroinval et que la Région a acheté dans le cadre de la création du parc national Entre-Sambre-Et-Meuse. Ce second calcul établit l’ensemble du bien, le fond et les bois, à 8,6 millions, soit 4 millions de plus que l’estimation réalisée par l’agent du DNF. Une différence telle que les élus arlonais se sont sentis grugés par l’administration wallonne…

"Un calcul objectif, qui tient compte du risque"

Le Service Publique de Wallonie, lui, confirme son calcul “réalisé selon une méthode objective, qui tient compte des cours du marché (75€ du mètre cube au moment de l’estimation, contre 100€ aujourd’hui) ; et qui inclut un facteur de risque de décote, établi à 25%”. Ce facteur de risque, nous explique Nicolas Yernaux, tient au fait que les centaines d’hectares ne peuvent se vendre du jour au lendemain. “Il est donc nécessaire d'intégrer une éventuelle dévaluation. Pendant la crise du scolyte, par exemple, des résineux se sont vendus à 5€ du mètre cube”.

A l’écoute de cette précision, on ne peut s’empêcher de s’interroger sur la hauteur du pourcentage de décote appliqué. A qui revenait-il d’intégrer cette éventuelle dévaluation ? Au vendeur, Arlon, qui est en droit d’attendre une expertise qui lui serait plutôt favorable ? Ou à l’acheteur, la Région wallonne, qui est en droit de se protéger et de parer à toute déconvenue éventuelle ? 

La meilleure expertise... est celle du compromis

Nous avons interrogé à ce propos une autre autorité au sein du DNF. “Depuis quinze ans, nous indique-t-il, les risques naturels se sont accélérés. A l’époque, les expertises tenaient même plutôt compte d’une plus value sur la réalisation. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. 25% de décotes ? Ça peut se comprendre, mais ça me parait beaucoup. Tout dépend des types de plantations. On se rend compte que certaines variétés s’avèrent résilientes par rapport au réchauffement climatique”. A l’écouter, on se rend compte à quel point expertiser un domaine forestier semble délicat, d’autant que la réalisation d’un bien (entendez, la coupe et la vente des bois) est soumise à une réglementation qui en limite la portée : “Le propriétaire ne peut procéder à des mises à blanc de plus de 5ha. Il doit donc procéder par “mitage”, par panachage de plusieurs zones de 5ha non jointives, s’il veut réaliser rapidement un maximum de son bien.”  La seconde expertise, plus favorable à la ville, a-t-elle tenu compte de cette impossibilité légale de pouvoir tout vendre tout de suite, et a-t-elle inclu une éventuelle décote ? “Ce que je peux vous dire, pour avoir pratiqué de nombreuses expertises, c’est que la meilleure évaluation est celle qui fait le compromis entre plusieurs autres…” 

Indirectement, l’agent DNF renvoie ainsi la ville d’Arlon à ses responsabilités, elle qui a fait confiance en un seul devis et n’a pas jugé bon d’en solliciter d’autres. Avant de vendre, en tout cas.
Plus étonnant, le porte-parole du SPW nous fait remarquer que la ville "n'a même pas essayé de négocier".
Excès de confiance naïve de la part des élus arlonais ? Manque de connaissance de leur domaine éloigné ? Gageons qu'on ne les y reprendra plus.

La balle est maintenant dans le camp de la ministre Céline Tellier, interpellée officiellement par la ville d’Arlon pour revoir le montant. Contactée, la ministre ne se prononce pas et attend “de recevoir la demande de la commune ainsi que le rapport de son expert privé”. Et il n'est pas impossible qu'elle réclame à son tour une expertise.


Christophe Thiry