Les devoirs d’enquête continuent autour de la Rave party organisée mi-octobre dans les anciens ateliers SNCB à Latour (Virton). Sept personnes impliquées dans l’organisation ont été identifiées.
Deux avaient déjà été condamnées dans le cadre de la Rave menée à Stockem aux premiers jours de l’an 2020.
Cela s’appelle jouer carte sur table !
Dans un long communiqué, détaillé, comme jamais vu auparavant, la zone de police Gaume et la ville de Virton reprennent toutes les étapes qui ont jalonné la Rave party des 10 au 12 octobre à Virton, sur laquelle on a dénombré près de 3000 personnes venues d’un peu partout en Europe.
Une mise au point voulue par les services d’ordre au regard de ce qui se dit et se lit sur les réseaux sociaux.
“Il y a un décalage complet entre la “vérité” des réseaux et la réalité ! Entre l’impression laissée par certains qu’il s’agit simplement d’une fête entre jeunes, qu’on aurait dû laisser faire, et d’autre part, tous les désagréments subis en matière de sécurité, de tranquillité et de salubrité publique”, nous confie Jean-Yves Schul, chef de zone de la police Gaume
Sur place, et lors des contrôles, les policiers ont mis la main sur plusieurs types de stupéfiants : marijuana, cocaïne, XTC, GHB…
Le site, ont constaté les propriétaires, a été dégradé et pillé, notamment les locaux du dépanneur Jourdan.
“Les participants ont érigé des barrages, pour entraver les déplacements des unités et bloquer les véhicules. De nombreuses dégradations ont été faites sur les véhicules de police, sans compter, cette multitude de déchets qui a dû être évacuée par les services de la commune”.
Un manque de moyens aux premières heures de l’intervention
L’évocation chronologique des faits met aussi en évidence les difficultés rencontrées par les équipes d’intervention aux premières heures du rassemblement. “On ne peut pas dire que nous n’avons pas eu de renforts dès le début, mais ce n’était pas suffisant", admet Le commissaire Schul.
"Les moyens dont nous disposons en polices locales ne permettent pas de faire face immédiatement à des rassemblements d’une telle ampleur, avec des personnes bien organisées.
C’était le cas avec cette Rave. On le vit aussi de plus en plus souvent avec les rassemblements de tuning”.
Des gros renforts pour l'évacuation le dimanche
Nous l’avons déjà évoqué, des moyens beaucoup plus importants ont par la suite été mobilisés. “Nous avons bénéficié du “Code Rouge”. Il y avait sur place deux escadrons, huit pelotons, deux arroseuses, un véhicule blindé APC, deux drones, un hélicoptère et des équipes spécialisées”.
Les phases de l’opération, détaillées par la police
Épisode 1 – Premières interventions à Saint - Hubert (10 octobre 2025 à partir de 22h45)
Le vendredi 10 octobre en soirée, un convoi d’environ cinquante véhicules a forcé un barrage de police sur la N66, en direction d’une rave - party dont le lieu était alors inconnu. Malgré les injonctions des forces de l’ordre, les véhicules ont poursuivi leur route, perturbant les dispositifs mis en place.
Sur la N89, près de Saint - Hubert, une trentaine de véhicules ont entravé l’intervention des policiers, allant jusqu’à percuter leurs véhicules. Une poursuite a été engagée par les zones de police Famenne - Ardenne, Semois et Lesse, ainsi que par la WPR. Elle a permis l’identification de trois véhicules et de cinq individus.
Le reste du convoi a été intercepté à 23h41, avec la découverte de matériel audio et d’une arme à feu. Deux personnes ont été privées de liberté.
En concertation avec le Parquet, plusieurs opérations ont été menées entre 00h13 et 03h46, incluant la fouille des véhicules, la saisie administrative de matériel, ainsi que des privations de liberté pour entraves méchantes et détention de stupéfiants en grande quantité.
À partir de 00h50, la localisation de la rave - party a été confirmée : les participants ont afflué en masse sur le site RAVAGO à Latour. Les équipes FERES ont été redéployées vers la zone de police de Gaume.
Épisode 2 – Premiers constats sur le site RAVAGO à Latour (11 octobre 2025 à partir de 00h50)
À 00h50, les services de la zone de police Gaume sont informés de la présence d’une trentaine de véhicules et camping - cars sur le site désaffecté de RAVAGO à Latour.
Un barrage est rapidement mis en place pour empêcher l’accès, et un contact est établi avec des participants afin de les inviter à quitter les lieux. La situation dégénère : plusieurs véhicules forcent le passage, mettant en danger les policiers.
Le spray collectif est utilisé pour permettre le repli en sécurité. Les équipes essuient des jets de projectiles et quittent les lieux à 01h17. Des renforts sont mobilisés, notamment des équipes des zones Sud - Luxembourg et Arlon.
À 02h58, les équipes de la ZP Gaume constatent un flux constant et croissant de véhicules convergeant vers le site RAVAGO.
Des dispositifs de contrôle sont mis en place pour identifier les véhicules des participants.
Malgré cela, plusieurs véhicules forcent les barrages. Un collègue de la ZP Gaume se retrouve sur le capot d’un véhicule, heureusement sans blessure. Les groupes électrogènes sont installés, le matériel de sonorisation est déployé, et la musique commence à retentir
À 03h32, le Procureur du Roi est avisé et donne les directives suivantes : "Faire cesser la rave - party ; Identifier les organisateurs; Rédiger les procès - verbaux en matière d’environnement ; Procéder à la saisie du matériel de sonorisation; Saisir les véhicules ayant servi à transporter le matériel"
À 04h18, l’Alpha Peloton FERES arrive au poste de police de Virton.
À 04h51, une tentative d’intervention échoue faute d’effectifs suffisants : les équipes sont encerclées, le dialogue est impossible et la situation est jugée trop dangereuse pour agir.
(toutes les photos de cet article ont été fournies par la police)
Épisode 3 – Évaluation et tentative de médiation (11 octobre 2025 à partir de 08h30)
Le samedi 11 octobre, une nouvelle évaluation est menée par la Zone de Police de Gaume. Des renforts sont mobilisés, incluant trois sections Hycap A, un peloton FERES et une unité arroseuse. Par mesure de sécurité, Infrabel est contacté pour ralentir le trafic ferroviaire à proximité du site RAVAGO. Les informations recueillies laissent présager une prolongation de la rave - party jusqu’au lundi.
À 12h40, une tentative de médiation est engagée sur le site. Deux individus sont rencontrés mais refusent de coopérer. La tension monte, rendant toute intervention immédiate trop risquée. Les festivaliers proposent un départ volontaire le dimanche à 15h00.
À 13h56, les forces de l’ordre se retirent du site.
L’après - midi est marqué par des signalements de personnes sous influence, des appels de riverains, et les premiers signes de dégradations.
Le Procureur du Roi confirme l’impossibilité d’intervenir avec les moyens disponibles. Un nouveau point est prévu le lendemain matin.
Épisode 4 – Fin de journée et nuit à Latour (11 octobre 2025)
La nuit s’est déroulée sans affrontement direct entre les participants et les forces de l’ordre.
Des contrôles menés par les équipes mobiles aboutissent à la saisie de diverses substances stupéfiantes (kétamine, champignons hallucinogènes, amphétamines, XTC, cannabis).
Les policiers constatent également l’usage d’un drone par les participants, la présence de guetteurs et de véhicules équipés d’antennes CB
À 02h53, un véhicule immatriculé en Suisse force un barrage et roule sur une herse. Il est intercepté, et trois jeunes femmes sont privées de liberté pour entrave méchante à la circulation.
Épisode 5 – Opération d’évacuation coordonnée (12 octobre 2025 à partir de 08h30)
Le dimanche 12 octobre à 08h30, le Bourgmestre de Virton valide la mise en œuvre d’une opération d’évacuation du site RAVAGO.
Les préparatifs mobilisent deux escadrons venus de plusieurs provinces (Anvers, Limbourg, Liège, Namur, Luxembourg, Eupen, Hainaut, Flandre Orientale , Bruxelles ) ainsi que des unités spécialisées FERES (2 arroseuses, un blindé APC , plusieurs équipes canines , un service anti - drones, un hélicoptère ).
À 14h30, le mouvement de la colonne débute. À 15h30, les unités accèdent au site par les rails de chemin de fer, amorçant l’intervention
L’intervention débute par le refoulement des participants à l’aide de moyens spéciaux (lacrymogènes, arroseuse, APC), suivi de la fouille et de l’évacuation du bâtiment central. Une stratégie de désescalade est mise en œuvre pour favoriser une sortie progressive. En fin d’intervention, des barricades compliquent la sortie des véhicules, nécessitant à nouveau l’usage de moyens spéciaux.
Des escortes sont organisées pour permettre aux participants évacués à pied de récupérer leurs véhicules.
L’opération prend fin vers 22h30.