La participation citoyenne est-elle soluble dans la fusion des communes ? C'est un peu la question centrale de la démarche de Stéphane Van Den Eede. Après s'être intéressé à la fusion dans sa région, le Brabant wallon, il remet l'ouvrage sur le métier en Luxembourg, entre passé et futur.

Dans un peu plus d'un an, ce seront les élections communales. Avec en Luxembourg, un changement de taille : un scrutin unique pour Bastogne et Bertogne qui ont décidé de fusionner. Ce n'était plus arrivé depuis la grande fusion des communes de 1976. Un processus qui revient donc sur le devant de l'actualité et auquel s'intéresse Stéphane Van den Eede. Journaliste et membre du cercle historique l'Echarp, il avait déjà creusé l'histoire des fusions en Brabant wallon. Il s'intéresse aujourd'hui à la Province de Luxembourg, terre natale de l'ancien ministre de l'intérieur, Joseph Michel, mais également première région de Wallonie à connaître une nouvelle fusion depuis celles des années 70.

Du parallèle entre ces deux époques, il retient notamment la manière dont la nouvelle avait percolé dans l'opinion publique dès 1972 et la parution d'un document de travail du ministère de l'intérieur. En comparaison, la nouvelle de la fusion de Bastogne et Bertogne en février 2022, fut beaucoup plus brutale, analyse Stéphane Van den Eede :

"Dans la vie politique comme dans la vie personnelle, c'est souvent la manière dont on annonce  les choses, qui conditionne la possibilité de se réapproprier ou d'être partie prenante d'un processus. Et donc, cette surprise a nettement conditionné ce qui s'est passé par la suite, quand bien même il y avait des raisons objectives de fusionner ces deux communes.... et des raisons objectives de ne pas les fusionner".

La question se pose : Bastogne et Bertogne auraient-elles pu aller au bout de leur projet si leurs citoyens avaient été mis au courant ? C'est pour répondre à cette question et connaître le sentiment de la population que Stéphane Van den Eede est en Province de Luxembourg toute cette semaine. Il y rencontre des citoyens et acteurs politiques des communes de Bastogne et Bertogne, mais également celles et ceux qui ont vécu la fusion de 1976.

Le fonds Joseph Michel, une mine d'or pour les chercheurs

En 2001 déjà, pour les 25 ans de la fusion, le journaliste avait été l'un des premiers à compulser le volumineux fonds Joseph Michel, conservé aux Archives de l'État à Arlon.  Une somme d'archives qui ne demande qu'à être explorée, comme nous l'explique François Moreau, archiviste à Arlon. Il nous emmène dans les sous-sols du bâtiment où sont stockés près de 500 boîtes de documents :

"À dépouiller, cela peut prendre un certain temps, heureusement qu'on a l'inventaire pour aller directement au bon dossier. Ainsi chaque personne peut venir ici consulter le dossier sur sa commune. On y trouve l'avis des anciens conseils communaux, du gouverneur de province, de la députation permanente et d'autres instances. On a, par exemple, l'avis de la commission de toponymie pour savoir quel était le nom que devait porter la nouvelle commune. La section, la plus habitée ou ayant le plus de prestige... c'est notamment comme cela qu'on a choisi les noms pour Chiny ou Durbuy, tout est documenté ici".

Une mine d'or pour les chercheurs comme Stéphane Van den Eede qui ont également accès à la correspondance du ministre. L'occasion notamment de découvrir l'intérêt d'un futur poids lourd de la politique belge, Raymond Langendries, pour le processus de fusion et surtout son impact dans les urnes. Une question que se posent également les mandataires d'aujourd'hui.

Et les citoyens dans tout ça ?

Habitué des panels citoyens, Stéphane Van den Eede souhaiterait, lui, remettre le citoyen au centre du processus de fusion et parvenir à des recommandations à destination du monde politique.

Vous pouvez l'aider dans sa démarche en partageant avec lui votre ressenti sur les fusions de communes passées et à venir. Et peut-être aussi lever un coin du voile sur les petites histoires qui ont marqué la Grande. Savoir, par exemple, comment la commune de Bertogne a pris ce nom qu'elle s'apprête à perdre, alors qu'elle aurait pu s'appeler... commune de Longchamps.

Contact : stephane.vandeneede@gmail.com

Frédéric Feller