Dans la foulée de Marche-en-Famenne, la commune de Nassogne compte rejoindre l’intercommunale namuroise “BEP”, et ainsi bénéficier de services peu ou pas proposés chez Idélux. Le BEP a changé ses statuts pour s’ouvrir aux communes limitrophes, sans intention, toutefois, de concurrencer son homologue luxembourgeoise.
Le monopole des intercommunales a-t-il vécu ?
La question se pose alors même que l’intercommunale de développement économique namuroise “BEP” lance une offre de services aux communes situées en dehors de sa zone géographique “historique”.
"Pas de concurrence avec Idélux"
“L’objectif n’est pas de concurrencer les agences de développement territorial (ADT) déjà investies sur ces territoires, mais de proposer des services complémentaires que celles-ci n’offrent pas: cadastre des fabriques d’église, assistances en assurances, en gestion des ressources humaines, cybersécurité, énergie, crowdfunding… Des activités déjà bien maîtrisées par le BEP”, peut-on lire sur son site internet. “Ces nouvelles missions pourront également amener de nouveaux besoins, pour lesquels le BEP pourra développer de nouvelles expertises ou enrichir celles existantes”.
La démarche initiée au printemps dernier a été rendue possible par une modification des statuts de l’intercommunale, donnant formellement la possibilité aux communes qui le souhaitent d’acquérir des parts de société et d’en devenir actionnaires. Ce faisant, les nouveaux adhérents obtiennent le droit de solliciter les services en “in house”, sans devoir recourir à des appels d'offres publics.
Déjà avec Marche-en-Famenne. Bientôt Nassogne et Durbuy
L’invitation du BEP cible les communes limitrophes et a d’ores et déjà reçu écho positif, côté hennuyer à Froidchapelle et Chimay, et côté luxembourgeois à Marche-en-Famenne, où le conseil communal a voté, en juillet dernier, en faveur d’une prise de participation dans le BEP. “Mais attention, nous restons toujours membre de l’intercommunale Idélux”, insiste d’emblée le bourgmestre marchois Nicolas Grégoire. “Il n’est pas question de faire jouer la concurrence entre les deux structures. D’ailleurs cela s’est fait en toute transparence avec Idélux. Mais nous voulons nous donner la possibilité de souscrire à des services qui ne sont pas proposés par notre intercommunale luxembourgeoise”.
Le bourgmestre marchois, par ailleurs reconduit, pour rappel, à la présidence de l’intercommunale Idélux Finances, précise : “Au sein du pays de Famenne, et donc en partenariat avec les communes de Rochefort, Somme-Leuze et Nassogne, nous avions déjà eu l’occasion de travailler avec le BEP dans la mise en oeuvre des projets POLLEC (pour “Politique locale Energie-Climat”, ndlr). Mais nous voulons aller plus loin en matière d’énergie. Pour Marche-en-Famenne, il était devenu primordial d’avancer rapidement dans la mise en place des Communautés d’énergie. Nous avions pu apprécier l’expertise du BEP dans ce domaine. L’occasion nous a été donnée de rejoindre l’intercommunale namuroise, nous n’avons pas hésité”.
Marche-en-famenne ne restera pas longtemps comme seule luxembourgeoise dans les structures du BEP. Ce jeudi soir, les conseillers communaux de Nassogne se prononceront sur l’adhésion de leur commune, “à l’instar de Marche-en-Famenne, uniquement pour les services fournis par le BEP en matière d’énergie”, confirme le bourgmestre Marc Quirynen. De même, le point sera bientôt débattu à Durbuy : “Nous voulons pouvoir bénéficier de services qu’Idélux ne propose pas”.
BEP et Idélux restent en bons termes
Comment l’intercommunale luxembourgeoise réagit-elle à ce débarquement sur ses plates bandes ? “Sans le moindre souci”, nous assure Fabian Collard. “Nous avons toujours entretenu de bonnes relations avec le BEP. Il nous a d’ailleurs informés de la démarche dès le début, et pour nous il n’y a aucun problème à ce que des communes luxembourgeoises se tournent vers notre consoeur namuroise, dès lors qu’Idélux ne propose pas de services en matière de communautés d’énergie”.
Non pas qu’Idélux se désintéresse de cette matière : “C’est une question de ressources. Dans le cadre des dossiers POLLEC, nous avons eu beaucoup de difficultés à recruter des spécialistes en énergie. La concurrence est rude. Le BEP le fait très bien”, souligne Fabian Collard.
Même si elle apparaît surprenante, cette démarche “hors frontière” n’est pas une première. “Un seul exemple : quelques communes luxembourgeoises font appel à l’intercommunale liégeoise Ecetia, spécialisée dans le conseil immobilier”, nous indique le directeur général d’Idélux.
On pourrait aussi citer Idélux Environnement, qui intègre onze communes liégeoises… A ceci près qu’en matière de gestion des déchets, les communes membres ne peuvent “aller et venir” au gré des services et sont liées à leur intercommunale durant toute la durée -trente ans- d’existence de l’assemblée.
Faut-il alors voir, dans cette offre de services du BEP, le début d’une hyperspécialisation des intercommunales wallonnes ? Où chacune acquerrait une expertise de pointe à mettre au service de communes sur l’ensemble du territoire wallon ? Le directeur d’Idélux n’y est pas favorable : “On y perdrait en proximité et en connaissance du territoire. La force de nos équipes est d’être sur le terrain, aux côtés des communes”.
Il n'empêche, un agent communal proche du dossier y voit bien, lui, une opportunité : "si on peut faire jouer la concurrence, et aller aux meilleurs services au moins cher, pourquoi pas. Ce n'en sera que tout bénéfice pour nos communes..."