Publié le mercredi 10 fevrier 2021 à 12:38 - Mis à jour le mercredi 10 fevrier 2021 à 13:35 Province
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Un mois après la Commission européenne, l’Organisation mondiale de la santé animale a rendu fin décembre à la Belgique son statut “indemne de PPA”, autorisant ainsi les éleveurs de porcs gaumais à relancer leurs activités. Excellente nouvelle.
Mais si la région est exempte de virus, pourquoi donc la Région wallonne maintient-elle les tirs de nuit et le piégeage en “zones PPA” ?
C’est en substance la question que se posent les trois conseils cynégétiques de Gaume, de Semois et de Lorraine, dans un courrier dont nous avons pris connaissance, adressé début février à la ministre de l’Environnement Céline Tellier, et aux inspecteurs généraux du DNF Jean-Pierre Scohy et du DEMNA Marc Herman.
Rien n’oblige la Wallonie
Par l’entremise de leur avocat, Me Grégory Cludts, spécialiste en matières de chasse et membre du Royal Saint-Hubert Club, les trois conseils cynégétiques réclament du gouvernement wallon qu’il mette un terme “le plus rapidement possible aux tirs de nuit et aux pièges cages”.
S’appuyant sur la directive européenne en la matière, les conseils cynégétiques estiment que le gouvernement wallon va trop loin. “La directive n’impose pas le maintien de telles dispositions. C’est le gouvernement wallon, librement, qui a décidé de les poursuivre”, nous explique Grégory Cludts.
Le maintien de ces prélèvements est d’autant plus incompréhensible pour ces chasseurs que le gouvernement lui-même stipule dans un de ses arrêtés du 3 décembre, que “la probabilité de retrouver encore des sangliers et des os viropositifs (...) est devenue extrêmement faible et que le risque de propagation de la maladie au départ de ces zones peut désormais être considéré comme inexistant aujourd’hui.”
Dépopulation n’est pas éradication
Pour ces trois conseils cynégétiques, la Wallonie a atteint l’objectif de “dépopulation” de sangliers, entendez une diminution drastique. Et rien, selon eux, ne la contraint à maintenir le cap vers une “éradication”, soit une destruction totale des animaux.
“Dans ce combat pour diminuer les populations, tout le monde a fait le job, y compris les chasseurs. Mais maintenant nous ne comprenons pas pourquoi ils s’obligent à aller chercher les derniers sangliers. D’ailleurs, cet objectif est voué à l’échec, prédit Grégory Cludts, jamais ils n’arriveront à tous les abattre”.
La Région maintient
La Région wallonne, par l’entremise de Marc Herman, inspecteur général du DEMNA, confirme : “Nous avons bien reçu ce courrier et nous allons y répondre. Non, nous n’allons pas stopper les prélèvements de sangliers, comme ces conseils cynégétiques le souhaitent, mais bien poursuivre jusque fin mars 2021 nos objectifs : être sûrs et certains que nous sommes venus à bout du virus !”
Indemne de PPA
Le dernier cas de sanglier infecté remonte au 4 mars 2020. Il s’agissait d’une dépouille, dont les analyses ont démontré qu’elle reposait là depuis cinq ou six mois. Depuis, plus rien. Plus aucune trace du virus. C’est ce qui a ouvert les portes à un retour à la normale.
“Mais ce sont aussi tous les engagements que nous avons pris qui ont convaincu la Commission européenne et l’OIE de nous rendre le statut de région “indemne de PPA”, assure celui qui dirige cette crise depuis plus de deux ans. Parmi ses engagements, la Wallonie avait annoncé poursuivre les prélèvements et analyses systématiques des sangliers encore présents en zones PPA.
Il reste des poches de sangliers
“L’idéal eut été d’arriver à un vide sanitaire : l’arrêt du virus, faute de transporteurs”, avance Marc Herman. Mais force est de constater que malgré les battues, malgré les tirs de nuit, malgré les 170 pièges posés, il reste encore des suidés.
Via les caméras de surveillance, la Région a identifié la présence de plusieurs poches, parfois jusqu’à dix-quinze sangliers regroupés aux mêmes endroits.
Ne courir aucun risque
Des sangliers à priori sains… Mais, reprenant à son compte l’image des pompiers qui après être venus à bout d’un gros incendie poursuivent la surveillance, Marc Herman insiste : “la Région ne veut courir le moindre risque.”
Et s’affranchir de toute reprise, impose selon lui de suivre le plan de sortie jusqu’au bout. “Un plan approuvé par les ministres Céline Tellier et Willy Borsus, expliqué et présenté aux chasseurs, à l’occasion de plusieurs réunions”.
A la mi-janvier la Région a donc repris le piégeage et les tirs de nuit en forêt et en plaine par des agents du DNF. “Je peux comprendre les réactions des membres de ces trois conseils cynégétiques, admet Marc Herman, mais l’enjeu est trop important.”
Et de rappeler que la crise de la PPA n’a pas eu que des impacts sur les populations de gibiers et sur la passion des chasseurs. Elle a aussi surtout eu des conséquences dramatiques pour d’autres filières économiques, élevages et sylviculture, empêchant de nombreux indépendants à exercer leur métier. Les gouvernements ont estimé à 154.000.000€ le manque à gagner du secteur de la viande à cause de la PPA.
De nouvelles zones après le 31 mars
Après le 31 mars 2021, la sortie de crise PPA entrera dans une nouvelle phase. Les zones seront rebaptisées et les mesures adaptées :
Les “zone d’observation renforcée” et “zone de vigilance” deviendront une seule “zone d’observation”. Dans cette zone d’observation, la Wallonie procédera à des analyses par échantillonnage, et les venaisons pourront être commercialisées.
La “zone infectée” deviendra “zone de surveillance". Ici, tous les sangliers tirés seront systématiquement analysés et les carcasses détruites.
La crise n’est pas encore finie…
Chr. Thiry