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Arlon : le discours de la Fête du Roi

Arlon : le discours de la Fête du Roi
 Publié le jeudi 15 novembre 2018 à 16:35    Arlon


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Aujourd'hui 15  novembre, c'est la fête du Roi. Ce matin, comme le veut la tradition en province de Luxembourg, les différents représentants des cultes israélite, catholique, musulman, protestant et orthodoxe se sont réunis pour le Te Deum donné en l'église saint-Martin d'Arlon.

Après l'office, ils ont été rejoints par la communauté laïque, et se sont retrouvés au Palais à Arlon, pour la partie officielle, avec un discours commun, portant sur le dialogue interconvictionnel, et l'importance de l'écoute, dans le respect des différences.

Voici le texte du discours :

Le défi consiste à passer du règne des communautarisations à celui de l’universalisme dans le respect du vivre ensemble et de la diversité. Respecter la diversité des choix philosophiques et religieux notamment. Que chacun soit libre de choisir la croyance ou l’incroyance ou la spiritualité qu’il souhaite. Et que chacun accepte le choix de son voisin.

Pourquoi les religions sont-elles concurrentes ? Un de nous a proposé la réponse suivante : parce que chaque religion veut l’exclusivité de la vérité de la foi. Pourquoi plusieurs vérités ne pourraient-elles pas coexister ? Pourquoi vouloir en imposer une aux autres ? Si ces vérités ne contreviennent pas aux droits humains, ne peuvent-elles pas se parler, dialoguer, pour poursuivre toujours le travail de recherche et de progrès ?

N’est-ce pas le cas des différents courants philosophiques ? Plusieurs visions du monde coexistent, se nourrissent, se comparent et contribuent à un équilibre global.

Un dialogue entre communautés convictionnelles est possible : la concurrence, dont je parlais il y a un instant, peut être combattue si, au départ, un terrain d’entente est recherché. Une expérience commune positive peut alors créer un espace de parole libre qui était considéré initialement comme inaccessible entre des personnes de différentes origines religieuses et philosophiques.

La beauté du monde n’existe-t-elle pas du fait de sa diversité ?

Chaque communauté s’accorde à dire qu’oser, essayer, oser encore, remettre l’ouvrage sur le métier est en accord avec les valeurs auxquelles nous nous référons, quelle qu’en soit l’origine. Il ne faut pas être découragé par des échecs et des malentendus temporaires. Le travail sera ardu mais nous pouvons y arriver. Nous pouvons travailler ensemble. C’est le challenge commun que nous devons relever. Nous devons trouver cette force en nous. Et partir au travail.

Pouvons-nous y arriver ? Peut-on compter sur la volonté des femmes et des hommes de construire ensemble un espace de coexistence paisible de l’ensemble des communautés convictionnelles ?

Les hommes et les femmes veulent-ils la paix ? Sommes-nous des êtres pacifistes ou sommes-nous des guerriers ?

Comme le propose Jean-Jacques Rousseau, les femmes et les hommes naissent-ils bons et est-ce la société qui les corrompt ?

Qu’est-ce qui nous pousse à la violence ? Quels sont les remparts efficaces pour l’éviter ? La culture et l’éducation sont certainement nécessaires mais ne suffisent pas. L’exemple du nazisme, qui a surgi dans une des cultures les plus raffinées, nous l’a bien montré.

Une chose me rassure. Personne ici ce matin ne semble outré devant la volonté des cultes Israélite, Catholique, Musulman, Protestant et Orthodoxe et la volonté de la communauté non confessionnelle de travailler ensemble à construire cet espace de paix, de liberté et de dialogue.

Et rappelons-nous que toutes les religions sont des religions de paix. Et que la philosophie consiste à rechercher la sagesse.

Nous avons cette chance à Arlon d’avoir pu enclencher ce processus. Saisissons cette chance à bras le corps et faisons la grandir. Multiplions les dialogues, les opportunités de mieux nous connaitre et mieux nous comprendre comme nous l’avons fait il y a quelques mois sur la question de l’intégrisme.

Il me semble qu’un élément nous divise, nous pousse à la violence et nous éloigne d’une coexistence paisible. Cet élément, c’est la volonté d’avoir raison. Avoir raison. Dire « Ma vérité est l’unique vérité et la tienne ne vaut rien ». Dire « Je comprends mieux les choses que toi ». Dire « Écoute-moi, c’est moi qui ai raison ».

Notre égo ne veut pas avoir tort.

Au-delà de l’effort nécessaire pour limiter notre égo, comprendre deux choses peut nous accompagner et nous aider dans notre objectif de travailler ensemble efficacement.

La première idée est que nous devons comprendre que nous avons le droit à l’erreur. Pas seulement comprendre qu’il nous arrive de nous tromper mais comprendre que nous avons le droit de nous tromper. C’est en se trompant, quand on le réalise, qu’on grandit. Et nous pouvons nous tromper ensemble. Je ne donne aucune leçon ici, le premier qui se trompe chaque jour, c’est moi.

La seconde idée, comme je l’exprimais au début de mon intervention, c’est que plusieurs vérités peuvent coexister. Certainement en tout cas dans le domaine des croyances. Il faut intégrer cette idée au plus profond de nous-même pour pouvoir s’ouvrir à l’histoire de l’autre, à ses idées, à sa sagesse. Nous pouvons avoir raison ensemble.

Nous cherchons tous à construire une société juste et fraternelle. Nous voulons faire ce pari. Et je pense que nous ne sommes pas les seuls. Cultivons l’opportunité que nous avons ici à Arlon de faire grandir cet objectif. Je fais d’ailleurs un appel. Si l’une ou l’un d’entre vous souhaite participer à cet effort, venez nous voir, Wenceslas, Roland, Ludovic, Jean-Louis, Monique, ...

Venez nous proposer vos idées pour que l’initiative progresse et grandisse. C’est libres et ensemble que nous y arriverons.